Lors des derniers discours de Benyamin Netanyahou vers la fin de l’agression sur la bande de Gaza, il a comparé sans sourciller le Hamas à Daech. Justifiant ainsi le bien-fondé de son intervention meurtrière et préparant l’intervention des puissances qui l’ont soutenu en Iraq et en Syrie. Ainsi se déroule la politique des temps modernes, comme un film de Hollywood.
Le seul point en commun que peuvent avoir le Hamas et Daech est l’appartenance déclarée à l’Islam. Mais pour les instigateurs de la déstabilisation du Moyen-Orient ou le chaos organisé, c’est bien de la destruction de l’Islam dans les cœurs qu’il s’agit. Alors on est passé de la légitimation d’une défense même meurtrière d’un état colonisateur et usurpateur de terres à la légitimation d’attaques aériennes sur un Iraq martyrisé et déchiqueté et une Syrie affaiblie et qui sombre dans une fitna.
La même formule continue à fonctionner. On crée le monstre, on le laisse grossir et grandir, ensuite on lui fait faire des exactions, pour finir par justifier la mise en place d’une attaque et pourquoi pas une occupation directe ou indirecte par des traîtres. S’agit-il de la théorie du complot ? non pas du tout, bien-sûr, c’est tout simplement un dessin machiavélique qu’on répète ad nauseaum. Pour le malheur des peuples.
C’est toujours la même histoire qui se répète et qui réussit à merveille. Les donneurs de leçon se drapent sous le voile fallacieux de l’ONU, des droits des peuples et se donnent une légitimité internationale afin d’exécuter leurs agendas militaro-industriels. Tout ceci est mis en scène et servi par les médias mainstream pour un public crédule et tétanisé par la peur.
Daech ou état « islamique » de l’Iraq et du Levant est ce dernier-né et qui fait suite à une série d’ogres enfantés ces dernières années, adossés bien évidemment à l’Islam. Il a fallu des hommes qui souhaitent vivre dans un monde différent qui répond aux principes littéralistes de l’Islam et qu’on leur fasse subir des injustices appliquées en règle dans les prisons de la honte comme Guantánamo, Abou Gharib et leurs annexes dans la plupart des pays dits musulmans, pour engendrer des personnes prêtes à en découdre si les moyens se présentaient à eux.
Ensuite, les moyens ont été mis par enchantement à leur disposition associés à des circonstances favorisantes leur faisant croire qu’il y a une opportunité de vivre dans un véritable état islamique. L’application littérale de certaines prescriptions coraniques. Couper la main du voleur et les châtiments corporels leur donnaient une mauvaise image. Les décapitations mises en scène et filmées d’une part et les exécutions sommaires d’autre part ont fini par les rendre inhumains aux yeux du monde et justifier ainsi tous les moyens pour s’en débarrasser.
Les Talibans en Afghanistan ont été un alibi en leur temps pour une coalition internationale meurtrière contre ce pays. Profitant du choc tétanisant du 11 septembre, les occidentaux derrière les américains ont utilisé alors des moyens disproportionnés et justifier une présence étrangère, rallongeant ainsi la vie et le danger de Ben Laden. De l’Afghanistan, ils ont glissé vers le Pakistan et la région pachtoune pour mener à bien une guerre illégale par des drones tueurs. Et tant que les Talibans restent présents, le danger reste aussi, justifiant la présence et les frappes aériennes. Ensuite, on a l’embarras du choix, entre les Chabab de Somalie, le BoKo Haram du Nigéria et dernièrement Anssar Eddine au Mali qui ont justifié la dernière guerre de la France en Afrique et son installation dans la région.
Pour les arabes, le plat est plus corsé, parce qu’il ne s’agira pas seulement de les mettre sous tutelle comme par le passé mais de tuer le maximum d’entre eux et de diviser leurs pays, tel est le plan concocté depuis des décennies par Bernard Lewis et Henry Kissinger. Alors Al Qaïda, qui signifie la base « de données » (de ceux qui ont combattu en Afghanistan avec Ben Laden) a vu le jour avec une publicité tonitruante aussi bien par les médias occidentaux que par Al Jazeera créée à cet effet. Cette Qaïda et son patron présenté comme le mal absolu et servie comme très puissante afin de pouvoir utiliser tous les moyens pour éliminer ses éléments, outrepassant tous les droits dont les pays donneurs de leçons s’émeuvent. Ensuite, elle a eu des relais au Yémen, au Maghreb et en Iraq. Les mêmes politiques meurtrières et liberticides ont été mises en place dans ces pays, pour le malheur des populations.
Pendant 51 jours de l’été dernier, les habitants de Gaza ont vécu dans une peur permanente et sous le feu nourri des bombes qui massacrent des humains et détruisent des maisons, des immeubles et des mosquées. Parce que l’ennemi désigné est considéré comme un terroriste, alors le monde dit civilisé encourage cette armée d’occupation à utiliser tous les moyens contre une population sous embargo. Même l’armement de la résistance palestinienne poserait des questions lié à son origine et son développement. Et là c’est une autre affaire. Le Hamas représente en effet l’ennemi idéal qui justifie cette agression légitimée et encouragée par les maîtres du monde du moment.
Quand à Daech, les procédés sont différents, les images d’une horde de « sauvages » habillés à l’afghane avec des pick-up et une artillerie – en somme toute simple en comparaison à l’armada que possèdent des états comme avions radars, moyens de communications et espions – est capable de semer la peur. Les vidéos bien orchestrées (montées ou pas) de décapitations à la chaîne de prisonniers musulmans sans nom ou de différents occidentaux précieux, associés à d’autres vidéos de châtiments corporels finissent par ameuter toutes les foules contre ces barbares des temps modernes appelés bien évidemment « djihadistes » afin de décrédibiliser le Jihad à jamais et légitimer ainsi toutes les exactions cette fois-ci à leur encontre.
Ne faut-il pas sauver l’humanité libre et démocratique ? « Ils ne nous aiment pas parce que nous les attaquons, mais pour ce que nous sommes », n’hésitent pas à nous asséner les marchands de la peur, des drames … et des armes. Mais qui sont ces barbares ? Ce sont les produits des injustices qui ont poussé de jeunes musulmans à la radicalisation caressant le rêve d’un califat islamique juste et équitable. Pour cela un terrain devrait être préparé. Tout d’abord, il y a eu l’invasion de l’Iraq, sa déstabilisation et les exactions en règle vis-à-vis des sunnites du régime chiite soutenu par les américains. Vint ensuite un « printemps arabe » sanguinaire en Syrie. Finalement, un flot d’argent, beaucoup d’argent pour s’équiper et exister. La réussite d’une entreprise se trouve dans les conditions de sa création.
Daech avec une direction suspecte fait miroiter à des combattants aigris et pressés qu’ils pourraient vivre dans une ambiance musulmane improbable dans les temps modernes. De fait, ils peuvent donner l’alibi à la division des pays arabes prédite par Lewis d’une part et nuisent à l’Islam d’autre part poussant ainsi inconsciemment un grand nombre de musulmans vers le rejet de la religion afin de se démarquer de leur propre chef ou sous la pression d’une religion de destruction et de haine. Sans parler de l’image surannée offerte aux non musulmans. Les chrétiens n’ont-ils pas quitté leur religion suite à l’inquisition et ses excès ?
Avec ce tour de passe-passe, le combat est perdu pour des combattants candides et instrumentalisés de Daech, et doublement gagné pour les architectes du chaos organisé.
Dr Zouhair LAHNA