DISCRIMINATION SYSTÉMIQUE : ADM PORTE PLAINTE CONTRE LA POLICE !
C’est dans un contexte de confinement entraînant une hausse des discriminations envers les minorités que le Défenseur des Droits Monsieur Jacques Toubon a produit des observations quant aux plaintes de 18 jeunes pour discrimination raciale.
En prenant en compte les observations du Défenseur des Droits, ADM a donc mandaté William Bourdon et Bincent Brengarth pour porter plainte contre la discrimination raciale vécue par une partie de la population.
ADM attend également que le Ministre de l’Intérieur réagisse aux observations du Défenseur des Droits en reconnaissant, dénonçant, et mettant un terme à ce racisme systémique.
Nous ne pouvons que saluer l’initiative d’Action Droits des Musulmans (ADM) qui, contrairement à d’autres associations qui ne font qu’accompagner l’islamophobie, ose dénoncer le racisme systémique en portant plainte directement contre la police pour agir contre les discriminations subies par les minorités musulmanes ou visibles.
Communiqué de presse intégral d’ADM (03.06.2020) :
»En novembre 2016, par un arrêt de principe, la Cour de cassation a considéré qu’« un contrôle d’identité fondé sur des caractéristiques physiques associées à une origine réelle ou supposée, sans aucune justification objective préalable, est discriminatoire : il s’agit d’une faute lourde ».
Le 17 décembre 2019 un jugement du conseil de prud’hommes de Paris reconnaissait une « discrimination raciale et systémique » dans le BTP, avec l’existence d’une « discrimination raciale et systémique » concernant le traitement de travailleurs d’origine malienne.
Ces décisions démontrent que les juridictions nationales sont de plus en plus enclines à reconnaitre les discriminations raciales et, surtout, leur systématisation. Une dynamique nouvelle attachée à l’égalité et au respect des libertés publiques et individuelles a ainsi vu le jour. Ce besoin s’est encore manifesté lors du rassemblement pour Adama TRAORE qui s’est tenu le 2 juin 2020.
C’est dans ce contexte que, le 12 mai 2020, le Défenseur Des Droits (DDD), Monsieur Jacques TOUBON, a produit des observations concernant le dossier de 18 mineurs du 12ème Arrondissement de Paris défendus par Maître Slim BENACHOUR ayant déposé plainte pour de nombreuses violences en 2015. L’Etat avait été assigné le 3 juillet 2019. Cette initiative est soutenue par l’association MCDS, l’association le Soleil et l’organisation Open Society Justice Initiative.
La plainte est fondée sur des “faits de harcèlement discriminatoire et de discrimination en raison de leur origine. Les 18 plaignants « se décrivent tous comme étant noirs ou arabes ou perçus comme tels », mais aussi pour « violences aggravées, agressions sexuelles aggravées, séquestrations, arrestations arbitraires ».
Ces observations sont une première en France, puisqu’il est extrêmement difficile pour une personne d’apporter la preuve de sa discrimination en raison de son appartenance ethnique ou religieuse, a fortiori lorsque l’auteur des faits est un fonctionnaire de police.
Dans ces observations, le défenseur des droits écrit : “Dans la présente affaire, c’est ainsi la somme des pratiques constatées, la répétition des violations de procédures envers le groupe de jeunes gens du quartier d’origine maghrébine et africaine qui va conduire à la reconnaissance de la discrimination sous ses multiples formes qu’il s’agisse de discriminations directe, indirecte ou de harcèlement, créant un cadre où se déploie la discrimination systémique : l’effet cumulatif de ces comportements crée un climat d’exclusion et de discrimination.” Le DDD souligne que : “Ces contrôles discriminatoires et abusifs s’accompagnaient de propos racistes, d’agressions physiques et de transferts injustifiés au commissariat. Ces « contrôles d’éviction » sont accompagnés de « palpations, de fouilles et de conduites au commissariat » concernaient toujours les mêmes jeunes d’origine maghrébine et africaine, qualifiés « d’indésirables ».
Il poursuit : Faute de justification valable, ces faits, réalisés dans un tel contexte, doivent être regardés comme constitutifs de discrimination directe, indirecte, systémique et de harcèlement en raison de l’origine des plaignants, que l’Etat doit être en mesure de faire cesser et de réparer.”
Cette décision met en exergue une discrimination systémique, autrement dit une discrimination institutionnelle, puisque les ordres viennent de la hiérarchie et non “de cas isolés” témoignant d’un racisme individuel comme l’affirme fréquemment le ministère de l’Intérieur.
Ce racisme alimente l’idée d’un statut de citoyens de seconde zone pour certains jeunes. Le racisme structurel est de plus souvent accompagné de violences physiques et d’insultes à caractère racistes.
Ces faits sont régulièrement dénoncés par ADM et les ONG de la plateforme ” en finir avec les contrôles au faciès“ et d’autres collectifs. Il est à noter que durant le confinement, il y a eu une recrudescence de ces actes violents et racistes à l’égard des quartiers que nous suivons et documentons.
Pourtant, le ministère de l’Intérieur est dans le déni. C’est pourquoi, au vu de la gravité des faits, soit un “racisme systémique” émanant d’ordres du Ministère de l’intérieur, ADM prend acte des observations qui ont été formulées par le défenseur des droits et a mandaté William BOURDON et Vincent BRENGARTH afin de porter plainte et de permettre au parquet de suivre la situation de discrimination raciale vécues par une partie de la population.
ADM entend solliciter l’ouverture d’une enquête préliminaire des chefs de : discrimination raciale et de harcèlement contre toute personne ayant participé à la commission de ces faits en qualité d’auteur ou complice et que l’enquête permettra d’identifier, sans préjudice de toute autre infraction et/ou qualification que l’enquête permettra d’établir ou de déterminer. Il est aujourd’hui indispensable que la justice pénale se saisisse de tels faits pour qu’ils ne se reproduisent plus.
ADM attend également de Monsieur le ministre de l’Intérieur, qui n’a pas réagi publiquement aux observations du Défenseur des droits, qu’il dénonce ce racisme et lutte de manière systématique avec la société civile. Le Ministère de l’intérieur doit reconnaître qu’il existe effectivement des phénomènes de discriminations systémiques à l’égard de certaines populations et mettre un terme à de tels agissements. »