La Ville d’Alep dite libre connaît depuis le 22 avril une attaque par missiles sans précédent depuis le début de l’insurrection. C’est la politique de la terre brûlée chère aux russes et à l’armée syrienne régulière. Les premiers l’ont testée avec succès à Grozny sous la direction de Poutine et les seconds le font à chaque fois qu’un groupe de résistants s’empare d’une localité.
Au temps d’Assad père, c’est toute la ville de Hama qui a payé la présence de 200 à 300 combattants en 1982. On y a compté au bas mot plus de 30 000 morts sans parler des exactions sur des familles entières et l’exil de centaines de jeunes. Le régime se régénère et reproduit les mêmes réflexes. Pour déloger les combattants appelés terroristes pour être avec l’air du temps, on est prêt à assassiner toute la population autour. Toujours à Hama, le quartier Baba Amr a été complètement rasé parce que rempli d’insurgés. Une technique radicale apprise à l’école de la terreur.
Le régime estime que ceux qui ne sont pas partis de son côté ou n’ont pas fui le pays, ils soutiennent forcément les insurgés. La réalité est toute autre, la plupart des pauvres gens qui ont décidé malgré l’adversité de la guerre et l’insécurité de rester chez eux c’est parce que les camps n’offrent toujours pas un accueil digne et quitter le pays n’est pas chose aisée pour tout le monde.
On peut rappeler ici qu’il ne reste que le quart voire le tiers des habitants d’avant dans la partie est d’Alep dite libérée. Plus de 40 voire 50% des syriens ont quitté leur domicile, dont la moitié est actuellement à l’extérieur du pays.
D’après certaines publications, ce qui se passe actuellement à Alep est le résultat d’un deal entre puissants puisque Alep devrait revenir au régime dans le découpage du gâteau syrien prévu par les Etats-Unis et les Russes. L’opposition dite modérée ou l’armée libre n’ont pas voulu quitter cette partie d’Alep comme on leur a recommandé, ainsi le bain de sang a commencé pour les mettre devant le fait accompli. Le plan prévoit également des milices chiites de différentes nationalités pour combattre les terroristes d’Annosra devant un monde applaudissant les nouveaux vainqueurs contre l’islam radical.
Dans une lettre diffusée sur les réseaux sociaux, un responsable d’un hôpital local subventionné par un donateur européen, écrit qu’on lui demande explicitement de ne plus communiquer sur les exactions du régime, mais qu’il peut dire du mal d’Annosra. Et s’il ne le faisait pas, on lui a fait comprendre qu’il risquait des coupures ou un arrêt définitif des subventions. Techniques connues et rodées pour faire obtempérer tous les obligés. Les mêmes méthodes sont d’ailleurs appliquées chez les différentes Katibas et unités de combattants qui reçoivent leurs ordres respectifs de leurs donateurs. Eux aussi dépendants de leurs protecteurs internationaux. Et la boucle est bouclée.
Au-delà de tous ces calculs politiciens et marchandages, il y a au milieu une population civile qui subit les affres de la guerre, indépendamment de son tempérament et sa sensibilité. Elle est punie parce qu’elle n’a pas quitté la ville et survit malgré tout.
Le monde bien-pensant et ses courroies de transmission médiatique, d’organisations internationales et organisations non-gouvernementales sont bien tièdes eu égard au massacre que subît cette population démunie et meurtrie. On sait que les causes ne sont pas comparables et que le sang d’un musulman d’Alep ne peut égaler celui d’un occidental dans le concert des protestations mondiales tant sur le plan des officiels que celui des populations. Cependant, je n’accepte pas cette dichotomie des revendications et je ne me soumets pas à ces injustices.
Je suis certain que la volonté de vivre et de résister, la combativité des habitants, l’ingéniosité d’un certain nombre d’entre eux à transmettre ce qu’ils subissent au monde via les réseaux sociaux aura un impact sur les cerveaux non encore aliénés par la propagande et la bêtise. Ils ne laisseront pas Kerry et Poutine décider de leur avenir. Du moins, sans avoir résisté et offert au monde et aux générations futures des raisons de rêver et d’espérer.
Dr Zouhair LAHNA
Médecin humanitaire