Les deux interventions médiatiques de Diam’s à l’occasion de ses livres autobiographiques avaient fait jaser. C’est au tour de Fawzia Zouari de s’épancher sur ses propos et ses positons dans son livre « Je ne suis pas Diam’s » en la désignant comme figure de l’islamisme par la visibilité de son voile. Cette femme de 60 ans, écrivaine et journaliste tunisienne, dénigre avec violence le voile et celles qui osent l’arborer. Elle profite d’une interview accordée au journal Le point pour colporter encore davantage de préjugés et d’inepties sur les fidèles musulmans qui osent montrer leur religion. Elle s’érige comme une sorte de Jeanne d’Arc incomprise par « ses semblables » puisqu’elle se dit elle-même « excommuniée » par une partie de la oumma.
Afin de mettre en scène son discours et avant tout, semble-t-il de trouver une accroche vendeuse, elle utilise la figure de Diam’s. Elle dit ne pas se reconnaître dans sa présentation vestimentaire et dans la tournure qu’elle a donné à son interview au cours de l’émission Sept à Huit sur TF1.
« Je ne me reconnaissais pas en elle », single-t-elle.
Or, Diam’s n’a jamais demandé à ce que tous les musulmans de France se sentent représentés par elle, elle faisait la promotion de son autobiographie, une démarche plutôt personnelle par essence.
Elle fait par la suite référence à Diam’s comme s’apparentant au « mal » déjà tellement présent en France par la représentation péjorative dont sont victimes les musulmans. Or, pour expliquer toute l’attention portée sur la communauté musulmane et les préjugés y étant associés, elle estime que c’est de la faute des musulmans. Elle leur demande d’ailleurs de se remettre en question.
« Ne sommes-nous pas pour quelque chose dans ce malaise avec la République ? Le propos peut choquer, tant nous n’avons pas l’habitude de faire de mea culpa. »
Les femmes voilées qui sont agressées physiquement et verbalement devraient donc demander pardon à leur bourreau ? Elles devraient se présenter à plat ventre pour clamer leurs excuses d’oser, que dis-je, de brandir un voile sur leurs cheveux…
Son objectif est finalement de « mettre à part une minorité d’entre eux [les musulmans dits radicaux] dont il faut dénoncer le mépris du Blanc, la christianophobie, la judéophobie et le peu de cas fait de l’Histoire de France », un raccourci aussi grave est malgré tout acclamé par Le Figaro par la plume d’Ivan Rioufol jugeant l’ouvrage de « leçon de résistance ».
Fawzia Zouari affirme incarner l’islam salutaire pour la France, celui où les femmes ne doivent pas être voilées, où les musulmans pratiqueraient leur culte bien cachés, bien chez eux. En effet, pour elle, les femmes voilées seraient le relais de l’idéologie islamiste. L’espace public ne doit montrer aucune différence religieuse. Bref, cette journaliste est loin d’avoir saisi le sens de la laïcité, mot qu’elle agite à chacune de ses phrases tel un enfant qui voudrait montrer qu’il a bien appris sa leçon.
De même, sous prétexte de laïcité et de vouloir défendre les pauvres femmes musulmanes opprimées, elle voudrait interdire une liberté fondamentale qu’est le port du voile. Cette écrivaine ne considère l’espace public que sous un angle étriqué ne mettant en exergue qu’un volet conflictuel et n’exaltant que les dissensions alors qu’il est un lieu de rencontre de l’autre dans ce qui fait que ce dernier est différent de soi, sous ses acceptions personnelles et propres, ressemblantes et divergentes.
C’est à force de rabâcher ce discours islamophobe que les non musulmans se questionnent et refusent la vision d’un voile. A trop vouloir prôner une ressemblance en pointant du doigt les autres comme différents, l’auteure s’enfonce dans une crise identitaire bourgeonnante, bien triste à la soixantaine, pour laquelle elle creuse ses propres tranchées. Quel lamentable rhétorique que de pointer une énième fois le voile comme symbole de soumission de la femme alors que cet argument a été maintes fois contrecarré par des études sociologiques et par la propre voix des femmes voilées.
« C’est une façon de contrôler les femmes et leur sexualité. Et puis il y a aussi cette hypocrisie de la femme vertueuse parce qu’elle porte le voile. J’ai vu des quartiers en Tunisie où les prostituées voilées coûtaient plus cher que les non-voilées. C’est une façon d’interdire la femme pour pouvoir en jouir finalement. »
Profaner une pratique religieuse en l’hyper-sexualisant revient à prouver un argumentaire bien maigre puisqu’en plus d’être déplacé et d’étaler péniblement une conclusion pseudo-psychologique de l’inconscient masculin réduit à ne voir les femmes que pour la jouissance qu’il pourrait en tirer, Fawzia Zouari se situe dans un champ hors contexte puisque la France n’est pas la Tunisie. Porter le voile là-bas n’a pas la même symbolique, place et histoire qu’ici.
Au demeurant, pourquoi prendre Diam’s comme cible d’un discours sur l’antimachisme et l’insoumission alors que cette ex-chanteuse représente le paroxysme de la femme indépendante, puisque sans pression masculine, à l’aise et respectée dans un univers aussi masculin qu’est le rap, si ce n’est pour se démarquer avec un titre racoleur afin de faire vendre?…
En somme, cet ouvrage s’apparente davantage à une cure psychique de l’auteure qui se conforte dans son choix de ne pas porter le voile et qui veut le faire savoir autour d’elle car elle l’avait pourtant défendu, jadis… « Je me reproche d’avoir été trop compréhensive vis-à-vis du « phénomène » ».
Nessayem Sevau