Un groupe d’amis vivant à Alep ont photographié cette zone de guerre : les destructions des rues et les quartiers de la ville entraînées par la répression du régime, les manifestations, les interventions des rebelles, les actions humanitaires et les bombardements de la ville.
Ces jeunes photographes nous parlent aujourd’hui d’Alep et de la révolution en Syrie…
https://www.facebook.com/LensYoungHalabi
Source: Anzar Art
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A.Anzar / Les premières manifestations étaient à Dera’a puis à Homs et enfin dans la quasi-totalité de la Syrie. Selon vous, qu’est-ce qui a permis le déclenchement de toutes ces manifestations ?
Lens of a young Halabi / La propagation de la révolte était comme un miracle pour nous les syriens… Ceci est notable par tous ceux qui connaissent la peur qui envahissait le cœur des syriens avant même la révolution. Je pense que ce qui a poussé les gens à se soulever, c’était plutôt les images de tortures et la violence qu’on a pu voir à Dera’a et à Homs, chose qui a enflammé la plupart des jeunes.
Ajoutant à cela, l’immense répression et l’injustice que subit le peuple syrien ; c’est ce qui leur a donné le sentiment que c’était le moment de changer tout cela.
A.Anzar / Votre ville Alep est l’une des plus grandes villes en Syrie, et importante notamment d’un point de vue économique. Comment la flamme de la révolution a-t-elle atteint Alep et comment la population a-t-elle réagi face à cela ?
Lens of a young Halabi / Tout comme les autres villes, les causes de la révolution étaient déjà présentes à Alep, mais c’est aussi la volonté d’apporter un soutien aux autres villes révoltées qui a poussé les jeunes de cette ville à trouver des solutions pour organiser des manifestations et protester malgré la grande présence des services secrets et des shabihas [agents du régime Syrien] .
Au début, la réaction de la population était très limitée, mais peu à peu, la révolution s’est élargie, notamment lorsque les habitants ont commencé à subir de plus en plus d’injustice et la répression féroce du régime Syrien.
Les manifestations des étudiants des universités d’Alep avaient un rôle majeur dans le soulèvement de cette ville, surtout que la majorité d’entre eux ne venaient pas d’Alep et étaient donc des témoins de la révolution et de la torture dans les autres villes.
A.Anzar / Une grande quantité d’extraits a été publiée sur le net, et le monde entier a été témoin des crimes et de la répression féroce du régime syrien….les plus immondes des méthodes de torture, [des corps découpés ont été retrouvés] et d’humiliation comme forcer les manifestants à se prosterner devant le portrait de Bachar ont été utilisées….
Certains ont décrédibilisé ces images et d’autres y ont très vite cru étant donné l’importance du nombre de vidéos témoignant de ces actes barbares ; en tant que Syriens, quelle était votre position vis-à-vis de ces images ?
Lens of a young Halabi / Cette division des opinions était présente même parmi le peuple Syrien, sauf que la quantité immense de ces vidéos ainsi que la longue durée de la révolte qui a débuté depuis plus de deux ans était suffisante pour que le peuple entende et témoigne réellement des cas de tortures monstrueux qui ont lieu dans les prisons du régime.
Cela a convaincu tout le monde ici, sauf la partie du peuple qui soutient le régime avec arrogance et défend ce dernier d’une façon aveugle et illogique.
A.Anzar / Nous avons tous regardé la conférence du ministre syrien des affaires étrangères, Walid El Mouallem, qui a exposé des vidéos prétendant qu’elles étaient tournées à Deir Ezzour et Dera’a . Mais la nuit même de cette conférence, les individus qui figuraient dans les vidéos sont sortis au Liban pour dénoncer le mensonge du Walid El Moualem et montrer que les vidéos étaient tournées au Liban à DerbEtaba’ana en 2008. Ma question suivante est donc de savoir si vous pourriez nous préciser quand s’est opérée la transition d’une révolution pacifique à une révolution armée ?
Lens of a young Halabi / En général, nous pouvons dire que les six premiers mois de la révolution étaient pacifiques malgré la répression féroce … mais pour être précis, nous ne pouvons parler que de notre ville Alep où nous avons vécu et pour laquelle nous pouvons témoigner des évènements qui s’y sont produits…
La révolution armée à Alep n’a commencé qu’en Décembre 2012 ; quand les checkpoints du régime étaient attaqués la nuit, et dès le début du mois de Ramadan, l’armée Syrienne Libre est rentrée dans la ville, puis s’est positionnée dans les quartiers ; c’est à partir de ce moment-là que les batailles quotidiennes ont commencé.
L’armée régulière ne fait pas de différence entre des civils et des militaires. Les bombardements n’ont pas cessé depuis cette date jusqu’à aujourd’hui même.
Voilà ce qui concerne notre ville Alep, mais il faut savoir que l’armement a commencé bien avant cette date dans les banlieues d’Alep… peut-être bien en Mars-Avril 2012.
A.Anzar / L’armée Syrienne Libre avec son modeste arsenal est face à une armée régulière qui combat avec les chars [ T 72] , lance- missile, les avions de chasse MIGetc . Selon vous, est-ce que cela était nécessaire – malgré cette équation déséquilibrée– de poursuivre la résistance militaire contre le régime?
Lens of a youngHalabi / Sous la répression féroce du régime, personne n’a pu contrôler la réaction du peuple, surtout lors d’une absence des leaders de la révolution.
Nous avons également fait face à deux catégories de personnes : ceux qui voient que les manifestations pacifiques sont l’unique solution, et ceux qui disent que le régime ne tombera jamais sans une résistance militaire.
Cela, peut-être du fait de l’expérience de Hama et de sa manifestation de 400 000 personnes à laquelle le régime a répondu par un blocus total, puis une colonisation militaire de la ville et a finalement fini par faire taire la voix de la révolution.
Ceci a montré l’impuissance de la révolution pacifique devant l’armée régulière, et la nécessité d’une résistance armée.
A.Anzar / Nous remarquons que toutes les brigades de l’opposition sont musulmanes ou islamiques. Quel est donc le rôle de l’Islam dans la révolution pacifique et aussi dans la révolution armée ?
Lens of a young Halabi / La présence de la jeunesse islamique était très notable même au tout début de la révolution pacifique; cette jeunesse a contribué sous toutes ses formes à la révolution pacifique.
Cependant, une partie d’entre elle a pris les armes lors de la transition vers une résistance militaire.
C’est aussi la culture islamique qui encourage au Jihad qui consiste en un refus de l’oppression que ce soit pacifiquement ou par les armes dans un contexte de guerre.
A.Anzar / L’implication des brigades islamiques a énormément fait progresser au front le combat, s’en est suivie une inquiétude exprimée par l’occident notamment au sujet du dossier « Terrorisme » et particulièrement le rapprochement entre JubhatNosra et les autres brigades ; quelle est votre lecture à ce sujet, et quelle était l’attitude des combattants de JubhatNosra avec les habitants d’Alep ?
Lens of a young Halabi / À notre avis… l’occident par ces prétextes essaie de se débarrasser des jeunes moudjahidins qui sont loyaux envers la Syrie, et la décision de l’occident de mettre ces organisations sur la liste noire du terrorisme a outré le peuple syrien qui sait très bien que malgré le radicalisme de ces organisations sur certaines idées ou croyances, ils sont, en tant que personnes, des gens de très bonne volonté et ils n’ont pas d’autre couverture que le peuple.
A.Anzar / Quelques médias occidentaux et peu d’autres dans le monde arabe accusent l’opposition d’être soutenue ou financée par l’étranger – surtout des Etats-unis et des pays du golfe– et œuvre à « détruire » le pays et à « éloigner » la Syrie de la résistance et de la Palestine ..
Lens of a young Halabi / Si l’opposition était soutenue par l’étranger, le conflit n’aurait pas duré jusqu’à ce jour. Jusqu’à présent, il n’y a eu aucun accord officiel pour armer l’opposition syrienne…
Le peuple syrien dans sa globalité soutient la cause palestinienne et soutient la résistance palestinienne avant et après notre révolution…y compris nos jeunes révolutionnaires…qui ont vécu la souffrance et ressentent l’amertume de la privation, le déplacement et le blocus, les détentions et même la colonisation des villes et la violence contre les civils…
A.Anzar / Récemment, nous avons remarqué la diffusion d’une vidéo d’un des combattants de la brigade Al Farouk qui « mangeait » le cœur d’un shabih. La presse du monde entier a écrit sur cet acte y compris le journal Al Quds Al Arabi. Que dites-vous de cet acte?
Lens of a young Halabi / Nous ne savons pas ce que le monde attend des jeunes venus de différentes cultures, qui ont subi les pires des oppressions et des injustices …évidement que nous dénonçons avec sévérité cet acte, mais ce qui est très notable ici c’est que les vidéos qui montrent sans concession l’atrocité du comportement du régime n’attirent pas la même propagande ni la même attention…
A.Anzar / Il y en a qui disent que le régime de Bachar était un régime« dissident » qui a accueilli le Hezbollah ainsi que le Hamas, et qu’il ne fallait pas se révolter contre lui.
Lens of a young Halabi / Nous voulons que le nouveau régime soit résistant, non pas par les paroles et par les apparences mais nous voulons une vraie résistance….
Notre révolution est contre l’injustice que le peuple a subi, chose qui a été révélée récemment alors que le peuple souffre depuis des décennies, et il est de notre droit de demander des changements peu importe la politique étrangère de ce régime.
A.Anzar / L’élite mondiale, y compris la Russie et les Etats-Unis, appelle à une solution pacifique, le rejet des armes, et la négociation avec le régime. Quepensez-vous de cette solution ?
Lens of a young Halabi / Le régime ne renoncera pas aux armes. Nous n’avons aucun doute là-dessus. Et il n’arrêtera pas d’opprimer son peuple, la preuve en est le retour de la violence durant cette dernière période, ainsi que l’implication du Hezbollah au côté du régime syrien avant le congrès de Genève.
A.Anzar / La Syrie est dans sa 3ème année de révolution, aujourd’hui les milices du Hezbollah sont rentrées en Syrie pour combattre aux côtés du régime Syrien, chose qui a été appuyée par les discours d’Hassan Nassrallah ainsi que l’élite iranienne. Quelle est votre lecture sur cette implication ?
Lens of a young Halabi / Le Hezbollah (en tant que résistance), devrait trouver sa place sur les fronts contre Israël. Malheureusement son implication dans le conflit Syrien mènera certainement à une situation catastrophique pour la région toute entière.
C’est une implication honteuse et néfaste pour le Hezbollah, l’Iran et ce régime confessionnel.
A.Anzar / Avez-vous des preuves de l’existence des milices du Hezbollah à Alep par exemple et dans les autres villes – sans compter AlQusayer et Homs – ?
Lens of a young Halabi / Selon nos sources d’informations…oui !
A.Anzar / Le Hezbollah chiite, les troupes de NourAl-Maliki, et les milices d’Al-Assad combattent tous contre les rebelles, sommes-nous devant une guerre sectaire ?
Lens of a young Halabi / A ce qu’il paraît… mais qu’Allah nous évite cela !
A.Anzar / Des brigades de l’ASL et d’autres brigades islamistes ont commencé à s’unir et se regrouper en une seule armée sous le nom de « l’armée de La ilaha Ila Allah Mohammed rassoul Allah », qui regroupe plus de 25 brigades, et le début de la bataille d’Al Forqane a été déclaré à Al Ghouta de Damas, quelle est votre analyse sur ce changement ?
Lens of a young Halabi / Les rebelles d’Al Ghouta de Damas sont parmi les rebelles les plus organisés et les plus unifiés, et c’est ce qui nous donne de l’espoir et de la tranquillité.
A.Anzar / Le Dr.AbdelBariAtwan, spécialiste des résistances islamiques et éditeur en chef du journal « Al Quds Al Arabi » avait déclaré que l’occident ne s’intéresse pas au peuple Syrien ni aux massacres commis contre ce peuple.
Tout ce qui intéresse l’occident, c’est le sujet des armes chimiques et le fait qu’elles ne tombent pas dans les mains de brigades islamistes ou plus précisément JubhatNosra, car si c’était le cas, ces brigades attaqueraient Israël. Que pensez-vous de cette analyse ?
Lens of a young Halabi / Nous sommes tout à fait conscients du fait que l’occident s’intéresse seulement à la sécurité d’Israël. C’est devenu une affaire très claire pour le peuple Syrien.
A.Anzar / Le penseur panarabe Azmi Bchar avait dit : « tout individu qui négociera avec le régime pour que ce dernier reste au pouvoir – sans préciser que la chute du régime actuel est la principale demande de la révolution – est un traître, peu importe sa personne ». Êtes-vous d’accord avec cet avis ?
Lens of a young Halabi / Tous ces sacrifices n’auront plus aucune valeur si le régime ne dégage pas, et peu importe la méthode …pacifiquement ou militairement.
A.Anzar / Comment voyez-vous la Syrie post-guerre ? Y’a-t-il toujours un espoir ?
Lens of a young Halabi / L’espoir existe toujours ; nous le voyons dans la sincérité de nos jeunes révolutionnaires, dans les yeux des enfants innocents qui ont grandi avant l’âge, nous le voyons sur le terrain, comment la vie se soulève de sous les décombres, jour après jour, et nous avons toute confiance en ce peuple et en ses capacités à dépasser toutes les difficultés, malgré les grandes peurs qui vont apparaitre dès que le voile sera retiré de la grande souffrance du peuple et de la haine qui a pénétré les cœurs .
A.Anzar / Quelle est votre position par rapport à la Palestine et au Golan Syrien qui sont occupés par l’occupation israélienne ?
Lens of a young Halabi / Le Golan est une terre arabo-syrienne occupée par Israël ; il en est de même pour la Palestine, et nous sommes pour le retour de ces droits à leurs propriétaires.
A.Anzar / Pouvez-vous passer un message, à partir de notre site, à la communauté musulmane ? En quoi le peuple Syrien esten besoin – au présent et dans le futur – ?
Lens of a young Halabi / Nous leurs demandons de se réveiller pour cette cause qui changera certainement la situation de toute cette région. La Syrie et le peuple syrien sont laissés seuls face aux ennemis du monde arabe et du monde musulman, et si cela continue dans cette voie, tous les autres pays arabes seront en danger !
La plus grande responsabilité repose sur les épaules des gouverneurs arabes, aucun effort n’a été fait pour arrêter cette crise, aucune solution n’a été envisagée. Il suffit de voir la situation des réfugiés dans le monde arabe et leur souffrance alors qu’ils sont aux cotés des pays pétroliers !
Tous les pays ont fermé leurs portes au peuple syrien, et certains même interdisent les visites. Même au sein de la communauté nous ne sentons pas une vraie solidarité ni une fraternité suffisante !
Rares sont ceux qui suivent nos actualités et qui s’intéressent vraiment à notre sort… tout comme sont rares ceux qui connaissent la vérité sur le terrain !
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Pour soutenir les associations humanitaires qui aident le peuple syrien, contactez :
http://syriansfriendsparis.com/
http://www.association-misericorde.org/
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